Celle-ci valait particulièrement la peine d’être restaurée. Le genre de montre impossible de voir sur le poignet de son voisin, même dans un salon horloger, ou alors peut-être bien à Munich. Pas forcément une montre qui a fait la guerre, cependant une montre de 1915, emboîtée à Londres avec la collaboration d’un certain Aegler, le premier partenaire horloger d’un jeune entrepreneur allemand qui allait bousculer les codes de l’horlogerie, Hans Wildorf alias le fondateur de Rolex, associé à son beau frère, Alfred Davis. La boîte argent, en plus d’être jolie, est d’une conception originale, la lunette et le fond sont vissés, ce qui n’était vraiment pas courant début XXe. Le petit plus qui lui rajoute du charme, une grille de protection rapportée à la boîte et maintenue par le bracelet.
Dans le fond sont gravés des indices qui m’ont permis de déterminer l’origine de la fabrication de cette petite de 30mm, le sigle de Londres et la lettre T, pour 1915. Le poinçon argent 925 est associé à la lettre F, mis pour Foreigner et désigne donc un produit d’importation de métaux précieux.
Côté mouvement c’est du suisse, gravé Rebberg (le nom de la fabrique appartenant à la famille Aegler), et malheureusement 3 rubis (sertis) sont fêlés, le spiral rouillé, et la roue d’échappement cassée. Sur une montre de 50 ans plus récente c’est un moindre problème. Mais sur ce calibre et sans réf. précise, sachant que les Rebberg ont été produits pendant 25 ans sous plusieurs tailles, avec des ajustements et des composants différents, bonjour la galère ! Car on en trouve sur la baie, principalement en Angleterre, mais en photos ils ont tous la même apparence c’est là qu’est le hic. Si bien que pour restaurer cette montre j’ai du acheter 3 mouvements épaves de plus, prélevé la roue d’échappement sur l’un, un pont et le cadran/aiguilles sur l’autre, le balancier/spiral sur la 3e, autant dire qu’elle m’a coûté cher. Mais quelle excitation de la voir reprendre du pouls après rhabillage : 280 degrés d’amplitude à plat à mi armage, 250 au pendu. Et une dérive de plus ou moins 50s/jour, tolérable pour une montre de 100 ans.
C’est une belle pièce de musée, et vais probablement jouer le rôle de son gardien, en alternance avec sa cousine d’époque et de taille, la Harwood, une autre pièce symbolique de l’histoire de la montre de poignet. Des petits bijoux ces montres là 😃